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SCIE ( quartier de la)

 Au XIXe siècle, le quartier s’appelait Les Viviers et comprenait le Molard (ancienne place des Forains). Un chemin vicinal partait de la route de Suisse pour ressortir à la route des Fayards. Lors de la création d’un cimetière protestant en 1825, le chemin pris alors la dénomination : Chemin du Cimetière. Ce lieu de sépulture était divisé en deux parties, il fallait d’abord traverser un pré pour accéder à l’entrée en demi-cercle de l’espace funéraire. Ce dernier était clos par un mur de pierres de Meillerie, de deux mètres de hauteur, qui subsiste encore partiellement aujourd’hui.

Vraisemblablement créée par Pierre-Louis Bauly, en 1865, une scierie fut construite au bord de la Versoix, alimentée par un bief. En 1869, le cimetière protestant devenu trop exigu, a été désaffecté et le chemin s’appela alors: Chemin de la Scie.


 A gauche, la maison l’entrepreneur Ferrari. A droite, la scierie, importante entreprise de la commune.

Les travaux de construction de la ligne de chemin de fer entre 1854 et 1858 modifièrent profondément le quartier. Le remblai créé pour le viaduc barrait sur plus de 400 mètres le vallon de la Versoix et coupait en deux le quartier. Un tronçon du cours de la Versoix a été déplacé pour permettre à la rivière de traverser perpendiculairement la voie ferrée.

Entre 1870 et le début du XXe siècle, ce fut un citoyen valaisan du nom de Revaz* qui mit en valeur l'entreprise qu'il céda, l'âge venu, à Jacques Ramseyer. Des problèmes de santé contraignirent ce dernier à s'installer à Leysin; c'est alors que les frères Bopp arrivèrent à la Scie. Cette entreprise prit alors une grande extension. Entre 1920 et 1940, les frères Bopp occupèrent jusqu'à 42 collaborateurs, effectif considérable pour une entreprise du bois. L'entreprise était connue dans toute la région par son savoir-faire jusqu’à la fin des années 1960 ; la scie ne fonctionna plus dès lors. Reprise par la société Sarkos SA, active dans les emballages, cette menuiserie et caisserie fut détruite par un incendie en 1982.

* Echo du Petit-Lac, 17 décembre 1981
 Vers 1905, apéritif au jardin.

Près du pont, la grosse bâtisse de l’ancien péage, appelée La Profonde, était occupée par le relieur Mégevet. En ce début du vingtième siècle, le quartier ne comptait que quelques habitations dans cet espace qui était alors occupé par des parcelles de jardins. Vers 1925, l’entrepreneur André Ferrari est autorisé à créer un chemin pour mener à sa villa, à la condition d’en fermer l’accès par un « chabouris ». Il loue à la commune l’ancien cimetière pour en faire un dépôt. Ce chemin deviendra le chemin de l’Ancien-Péage.
Les frères Bopp construisent deux grandes villas, un petit immeuble d’habitation est bâti au bord de la rivière ainsi que la maison Golaz. Le quartier de la Scie est paisible, baigné et parfois inondé par la Versoix.
Entourée de sa haute haie de thuyas, la petite maison de Virginie Reymond est toujours là. Celle qu’on surnommait la Mère Adam est restée dans les mémoires. Les cheveux en bataille, poudrée comme on savait le faire à la Cour de Versailles, elle animait le quai de Versoix ou elle avait son commerce de location de canots. Dans la maison voisine, le peintre et sculpteur Edgar Favez pratiquait son art.
C’est là aussi que se trouvait l’atelier de Joseph Schmit, employé chez Favarger, qui venait passer ces moments de loisirs, il créait des bougeoirs avec des ceps de vignes, des mangeoires pour les oiseaux, rabotait un bout de planche. Dans sa cabane de bois, il hivernait l’IBIS canot qu’il avait construit lui-même et qu’il entretenait avec amour. Son père, Fidèle, constructeur de bateaux, l’avait probablement conseillé pour cet ouvrage.
Animé par tous ceux qui entretenaient leur jardin, parmi lesquels l’épicier Perotti, les ouvriers qui s’activaient à leur travail, le bruit de la Scie qui découpait les bois de charpente, le quartier vivait alors pleinement.
Vers la fin des années cinquante, des changements s’annonçaient. Le projet de la nouvelle route qui devait traverser Versoix occupait les conversations. Chacun y allait de son idée : Pont, tunnel, tranchée couverte, de quoi occuper ingénieurs et politiciens. Le serpent de mer remontait à la surface.

Georges Savary



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