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GRIPPE ESPAGNOLE 1918

La pandémie de coronavirus, qui frappe le monde entier, n’est pas sans rappeler l’épidémie de grippe espagnole qui sévit chez nous pendant l’été 1918 et qui fit plus de 20 millions de morts dans le monde.

(Photo d'illustration : Wikimédia / domaine public)


Nous avons trouvé dans Le Journal de Genève de cette période, des similitudes avec les restrictions qui nous sont adressées aujourd’hui. Fermetures des écoles et des lieux de cultes, réunions sportives et spectacles interdits, tout était fait pour stopper l’épidémie.

"A Versoix, ont lieu les obsèques du canonnier Joseph Charbonnier, de la batterie 16. Au cimetière, un détachement du bataillon 10 a rendu les honneurs et a tiré les salves, l'appointé Dutoit a prononcé d'émouvantes paroles sur le bord de la tombe. A Châtelaine, ont eu lieu les obsèques des deux internés français, Georges Blanchard et Désiré Wimbre, décédés tous deux à l'hôpital. De nombreux internés ont accompagné la dépouille mortelle de leurs camarades au cimetière, où le commandant français Lefebvre Dibon a pris la parole. A Fribourg et à Liestal, deux médecins qui soignaient des malades de la grippe sont décédés. A Genève, une souscription est ouverte en faveur des familles genevoises atteintes de la grippe espagnole."

« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés »

Le 22 juillet, dans la rubrique « Menus propos », au titre évocateur : En temps de grippe, son auteur nous dit :

"En temps de grippe « Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés », a dit le fabuliste d'une épidémie autrement dangereuse que celle qui nous visite. Ils ne mouraient pas tous, et leurs descendants se consoleront en voyant qu'il y a cinq grands quarts de siècle, les Genevois ont connu la grippe, qui n'était pas alors « espagnole » mais qu'on comparait aux coquettes parce qu'à leur exemple, ses faveurs allaient pour ainsi dire à chacun.

Voici ce qu'on lit dans le Journal de Genève du samedi 27 décembre 1788 sous la signature du Dr Odier, qui est un praticien et un savant réputé de son temps : Notice sur le catarre épidémique, vulgairement appelé la grippe, qui a régné cet automne à Genève.

« Dans tous les lieux où on a observé la marche des maladies épidémiques, on a remarqué de temps en temps des catarres qui, même au travers des mers, se répandaient avec rapidité d'un pays à l'autre, de manière à en affecter successivement, du plus au moins, presque tous les habitants.
Depuis que je pratique la médecine à Genève, c'est-à-dire dès l'an 1773, j'en ai vu trois qui ont été générales en Europe, et qui ont eu ceci de remarquable, c'est qu'elles ont été séparées l'une de l'autre par un intervalle de six ans, savoir en 1776, en 1782 et en 1788. Si elles suivent dorénavant la même marche, on peut s'attendre à une épidémie du même genre en 1794. « Mais cette prédiction, si c'en est une, n'a rien de bien effrayant, car cette maladie n'est presque jamais dangereuse. Elle ne devient mortelle à l'ordinaire que pour les malades déjà atteints de phtisie ou d'hydropisie de poitrine, et pour les gens déjà fort avancés en âge, ou d'une constitution faible et délicate, qui n'ont pas la force de résister à une fièvre catarrale, quelque légère qu'elle soit. Si elle est quelquefois funeste à de jeunes gens plus robustes, c'est presque toujours à la suite de quelque imprudence, qui convertit un simple catarre en pleurésie ou en inflammation de poitrine.

On lui a donné différents noms. Les Italiens l'appellent influenza, comme si elle était produite par quelque émanation secrète des astres. A Paris, on l'appelait, en 1776 et en 1782, la coquette. En dernier lieu, on l'a nommée la brienne. A Genève, elle a toujours pris le nom de grippe, mot qui, suivant la définition qu'en donne le dictionnaire de l'Académie, veut dire fantaisie, goût capricieux. "

Souhaitons que le goût capricieux de la caquette plus ou moins espagnole ne nous favorise plus bien longtemps. »

Renouvelons ce vœu afin que le coronavirus (2019-nCoV) nous épargne de sa fureur.

Georges Savary



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